Dans la continuité de l’étude d’impact menée en 2017 mettant en avant notamment les coûts évités de l’hébergement citoyen, mais aussi l’importance du lien social au sein des communautés SINGA, J’accueille a décidé de mener une nouvelle étude en 2023.
Il s’agit d’analyser l’impact du programme sur le parcours des personnes accueillies depuis 2015.
Accompagnée par le cabinet d’étude d’impact indépendant Improve, entreprise sociale dont la mission est d’éclairer et d’aiguiller les structures œuvrant pour le bien commun, cette étude a plusieurs enjeux : valoriser l’impact social du programme en démontrant la plus-value social de l’hébergement citoyen ; enrichir les outils de suivi déjà en place ; déterminer la force des liens créés entre accueillis et accueillants et leur impact sur les visions respectives de la société ; par là-même, enfin, améliorer l’accompagnement.
Concrètement, cette évaluation a pour objectif d’analyser l’impact du programme J’accueille sur l’inclusion des personnes accueillies et sur l’expérience d’accueil des personnes accueillantes, afin de quantifier, valoriser et mettre en perspective l’action de l’association mais aussi d’améliorer notre accompagnement.
L’étude s’est concentrée sur les personnes accueillies et accueillantes dont la cohabitation s’est achevée entre 2017 et 2023. En recueillant 384 réponses, le travail d’enquête a permis à l’échantillon d’atteindre d’excellents seuils de représentativité, ce qui permet d’accorder aux résultats de l’évaluation une fiabilité et une légitimité importantes.
Parce que c’est l’image la plus évidente de notre impact social, l’étude a notamment permis d’enrichir les 2 indicateurs clés, que nous suivons grâce aux bilans de sorties réalisés par les équipes, que sont l’accès à l’emploi et au logement pérenne des personnes accueillies.
Avec de nombreuses questions pour affiner les résultats, l’étude a permis de mieux comprendre ce qui se passe dans les années suivant la sortie du programme :
59 % des personnes accueillies sorties du programme vivent aujourd’hui dans des logements autonomes, contre 43% à la sortie du programme. Il faut ici comprendre que l’autonomisation des personnes est lancée, croissante et pérenne, même 5 ans après la fin du programme.
→ Les ¾ considèrent que cette amélioration a été rendue possible grâce à notre programme qui facilite, entre autres, une meilleure connaissance des démarches administratives.
Concernant l’emploi, la moitié des accueilli·e·s estime que le programme a permis une amélioration de la stabilité professionnel :
33% d’entre eux sont aujourd’hui en CDI, contre 22% à la sortie du programme (il y a entre 1 et 6 ans, donc). De la même façon, le taux d’emploi grimpe chaque année supplémentaire suivant la sortie du programme. les autres formes d’emploi (cdd, formation, entrepreneuriat…) qui doublent ce taux, sont détaillées dans l’étude.
→ Ainsi, plus le programme a été intégré il y a longtemps, plus la stabilité professionnelle est aujourd’hui importante.
Ensuite, nous en avions le sentiment depuis quelques années grâce aux témoignages reçus, mais il fallait le confirmer par l’étude : le programme favorise l’intégration sociale des personnes accueillies chez l’habitant.
En termes d’apprentissage de la langue française, 80% des accueilli·e·s estiment avoir progressé, dont ¾ grâce à l’accueil. 86 % d’entre eux ont également enrichi leurs connaissances sur la société française, et 75% estiment que cela est en partie dû à l’accueil.
Les connaissances acquises couvrent des domaines variés tels que la culture, la langue, la cuisine, la communication, etc. Cette intégration dans la société s’illustre aussi par la création de liens sociaux durables et forts avec les accueillant·e·s, y compris après l’accueil, et 76% des personnes accueillies affirment avoir créé une relation durable (plusieurs années après la sortie du programme) avec leurs accueillant·e·s.
Idem, du côté des accueillants qui sont 77% à indiquer avoir garder un lien avec la personne qu’ils ont accueillie. Le programme leur a également permis la découverte de connaissances plus larges, au-delà du droit des réfugié·e·s et des idées reçues, et 80% estiment avoir développé des connaissances (culture, cuisine, migrations, histoire et apport à l’autre) en ce domaine, dont ¾ grâce au programme.
Enfin, l’étude permet aussi d’évaluer la sensibilisation de l’entourage : 61% estiment que leur cohabitation a eu un impact positif sur le regard de leur entourage quant aux enjeux de migrations et 42% ont encouragé des proches à accueillir à leur tour. Ce chiffre peut paraître bas, mais étant donné les prérequis, notamment le fait d’avoir une chambre de libre, nombreuses sont les personnes qui ne peuvent pas matériellement prétendre à une cohabitation dans l’entourage des accueillants.
Concernant l’offre d’accompagnement social proposée par notre association, elle est considérée comme cruciale puisque 48% n’auraient pas participé à J’accueille sans cette proposition.
À SAVOIR - Avant de plonger dans l’étude détaillée
SI la qualité des résultats suscite un enthousiasme important, il est important de garder en tête les marges d’interprétation d’un tel travail, notamment en l’absence de groupe témoin. Cette méthodologie, plus longue et coûteuse, seule permettrait d’aboutir à encore plus de précision. Par ailleurs, les réponses reposant sur des estimations personnelles du “changement” et de son attribution (j’ai trouvé un emploi / un logement, j’ai progressé en français grâce à j’accueille- voir ci-dessous), sont forcément subjectives, qu’elles soient flatteuses ou critiques. La marge d’erreur nulle est donc évidemment impossible, et ce malgré la traduction des questionnaires en 5 langues pour les accueillis. La proportion importante d’Ukrainien·ne·s dans l’échantillon (23%) bénéficiant d’un statut et d’une situation particuliers est aussi à noter, celle-ci influençant les résultats. En effet, le statut de « bénéficiaire de la protection temporaire », donne accès à divers droits (allocations, autorisation de travailler, accès aux soins) mais à l’inverse, empêche l’accès à un logement social.
L’impact sur l’autonomie financière est donc peut-être artificiellement majoré, tandis que celui sur le logement est sans doute plus grand en réalité. Ces limites méthodologiques sont importantes à garder en tête, bien que communes pour ce type d’étude, mais n’empêchent pas de tirer des conclusions importantes.